Τέλη Ιουνίου 2007, πήγα στο Λουξεμβούργο, για να κάνω δύο εισηγήσεις σε σεμινάριο του Ευρωπαϊκού Ινστιτούτου Δημόσιας Διοίκησης - το πρόγραμμα το βλέπετε κατωτέρω. Μίλησα μία ώρα σχεδόν για τον Κανονισμό για τις Επιδόσεις, 1348/2000 και άλλη μια ώρα για τη μέχρι τότε νομολογία του ΔΕΚ αναφορικά με τον Κανονισμό αυτόν. Προς το τέλος της ίδιας χρονιάς (13.11.2007) τροποποιήθηκαν κάποιες ρυθμίσεις του Κανονισμού αυτού που είχαν δημιουργήσει προβλήματα και ο νέος Κανονισμός 1393/2007 άρχισε να ισχύει 13.11.2008. Οι εισηγήσεις μου αυτές (αδημοσίευτες) αποτέλεσαν και τη βάση της συμβολής μου στον Τόμο στη μνήμη Στ.Κουσούλη.
Τα Γαλλικά κείμενα των εισηγήσεών μου αυτών, σας παραθέτω κατωτέρω, μετά το πρόγραμμα.
Η πρώτη φωτογραφία είναι το ΕΚΠΛΗΚΤΙΚΟ κτίριο της Φιλαρμονικής του Λουξεμβούργου, για το οποίο θα σας ξαναμιλήσω, να είστε σίγουροι! Η δεύτερη είναι το κάστρο του Vianden, στο Λουξεμβούργο.
Υ.Γ. Το ότι 2-3 κομμάτια του κειμένου φαίνονται με μεγαλύτερα γράμματα και πιο αραιά, οφείλεται στην ηλεκτρονική μου ..ασχετοσύνη, πιθανότατα! Κάτι έκανα - κρεμώντας τα κείμενα - και το αποτέλεσμα είναι το αντίθετο του έργου τέχνης!
C’était
le sommet de Tampere sur l’Espace judiciaire européen, en 1999, quelques mois
après l’entrée en vigueur du Traité d’Amsterdam, qui a « sonné » la
nécessité de la création d’un droit procédural européen pour les litiges
internationaux. C’est alors que la création d’un tel droit est devenue objectif
prioritaire pour les Etats membres[7].
Caractère du règlement
On
dit, et on a raison, que les intérêts qu’on doit « soigner » e
Τα Γαλλικά κείμενα των εισηγήσεών μου αυτών, σας παραθέτω κατωτέρω, μετά το πρόγραμμα.
Η πρώτη φωτογραφία είναι το ΕΚΠΛΗΚΤΙΚΟ κτίριο της Φιλαρμονικής του Λουξεμβούργου, για το οποίο θα σας ξαναμιλήσω, να είστε σίγουροι! Η δεύτερη είναι το κάστρο του Vianden, στο Λουξεμβούργο.
Υ.Γ. Το ότι 2-3 κομμάτια του κειμένου φαίνονται με μεγαλύτερα γράμματα και πιο αραιά, οφείλεται στην ηλεκτρονική μου ..ασχετοσύνη, πιθανότατα! Κάτι έκανα - κρεμώντας τα κείμενα - και το αποτέλεσμα είναι το αντίθετο του έργου τέχνης!
Seminar
European Judicial Cooperation in Civil Matters
Civil Procedure Law Instruments
Luxembourg, 28 & 29 June 2007
Seminar Venue:
European Commission
Jean Monnet Building
Room M3
Organised by the
European Institute of Public Administration (EIPA) –
European Centre for Judges and Lawyers
Circuit de la Foire Internationale 2
L-1347 LUXEMBOURG
www.eipa.eu
Thursday 28th June 2007
08.45 – 09.15 REGISTRATION
09.15 – 09.45 Welcome and introduction to the seminar
Peter GOLDSCHMIDT, Director & Senior Lecturer, European Centre
for Judges and Lawyers, European Institute of Public Administration
(EIPA), Antenna Luxembourg (LU)
Carla BOTELHO, Lecturer, European Centre for Judges and
Lawyers, European Institute of Public Administration (EIPA),
Antenna Luxembourg (LU)
09.45 – 10.45 Council Regulation (EC) No 1206/2001 of 28 May 2001 on
cooperation between the courts of the Member States in the
taking of evidence in civil or commercial matters. Text, forms and
how to use them.
Luigi FUMAGALLI, Professor, University of Milan (IT)
10.45 – 11.15 Coffee break
11.15 – 12.00 Discussion
12.00 – 12.45 Council Regulation (EC) No 1348/2000 of 29 May 2000 on the
service in the Member States of judicial and extrajudicial
documents in civil or commercial matters. Text, forms and how to
use them.
Elina MOUSTAIRA, Professor, University of Athens, Faculty of Law
(EL)
12.45 – 14.15 Lunch
14.15 – 15.15 Recent case law of the European Court of Justice on Council
Regulation (EC) No 1348/2000 of 29 May 2000 on the service in
the Member States of judicial and extrajudicial documents in civil
or commercial matters
- C-443/03
- C-473/04
Elina MOUSTAIRA
15.15 – 16.00 Discussion
16.00 – 16.30 Coffee break
16.30 – 17.30 The European Judicial Network in Civil and Commercial Matters
Carlos Manuel DE MELO MARINHO, Judge, Portuguese Contact
Point of the EJNCC, Lisbon (PT)
17.30 –18.00 Discussion
18.00 End of the first day
18.15 Reception
Friday 29th June 2007
09.00– 10.00 Regulation (EC) No 805/2004 of the European Parliament and of
the Council of 21 April 2004 creating a European enforcement
order for uncontested claims. Text, forms and how to use them.
Karen VANDEKERCKHOVE, Administrator, Directorate General for
Justice, Freedom and Security, European Commission, Brussels (BE)
(invited)
10.00 – 10.45 Discussion
10.45 – 11.00 Coffee break
11.00 – 12.00 Regulation (EC) No 1896/2006 of the European Parliament and of
the Council of 12 December 2006 creating a European order for
payment procedure. Text, forms and how to use them.
Carla BOTELHO
12.00 – 12.45 Discussion
12.45 - 14.15 Lunch
14.00 – 15.00 (Proposal for a) Regulation establishing a European small claims
procedure. Text, forms and how to use them.
Carla BOTELHO
15.15 – 16.00 Discussion
16.00 Conclusions and evaluation
END OF THE SEMINAR
procedure. Text, forms and how to use them.
Carla BOTELHO
15.15 – 16.00 Discussion
16.00 Conclusions and evaluation
END OF THE SEMINAR
REGLEMENT 1348/2000 RELATIF A LA SIGNIFICATION ET A LA NOTIFICATION DANS LES ETATS MEMBRES DES ACTES JUDICIAIRES ET EXTRAJUDICIAIRES EN MATIERES CIVILE ET COMMERCIALE
Elina
MOUSTAIRA
Introduction
La
signification – notification des actes est un élément très important à la
coopération internationale en ce qui concerne le droit privé. D’après une
opinion, c’est vraiment le plus grand obstacle à cette « circulation
transfrontière de droit privé » (grenzüberschreitenden
Zivilrechtsverkehr)[1].
La
signification – notification des actes judiciaires (c’est elle qui présente les
plus grands problèmes, c’est pourquoi on s’occupe plutôt d’elle) concerne tant
l’administration de la justice que la protection du défendeur ainsi que
l’économie de la procédure[2].
On
pourrait dire que deux sont les buts primaires de la signification : le
premier est d’informer le destinataire. Elle serve, alors, le droit à la
défense. Le deuxième est la fixation d’un jour, suivant lequel il y aura de
conséquences certaines, tant procédurales que matérielles, les plus importants
desquelles sont la litispendance et le commencement des délais[3].
La
signification à l’étranger se considère comme partie d’une procédure interne.
Son but est de servir la procédure interne et d’y avoir certaines conséquences.
C’est alors la lex fori de l’Etat du tribunal qui décidera quelles
seront les conséquences à la procédure, de la signification à l’étranger[4]. C’est
elle la loi applicable à tout ce qui concerne les aspects procéduraux d’une
affaire transfrontière.
« Histoire »
du règlement
Le précédent
immédiat du règlement 1348/2000, duquel il a « hérité » le contenu en
substance, est la Convention en matière de signification et de notification
dans les Etats membres des actes judiciaires
et extrajudiciaires en matière civile et commerciale, ainsi qu’un
Protocole conférant à la Cour de justice des Communautés européennes
l’interprétation de cette convention. Le projet desdits convention et protocole avait été
adopté par le Conseil le 26 mai 1997. Cette Convention, faite sur la base de
l’article K 3 du traité de l’Union Européenne, n’est jamais entrée en
vigueur[5], car depuis, la base
juridique de la coopération judiciaire des Etats membres en matière civile a
été modifiée.
Le
premier instrument de coopération judiciaire était la Convention de Bruxelles
de 1968. Toutefois, c’était le traité de
Maastricht de 1992 celui qui a mis la « justice et affaires
intérieures » sur la carte européenne institutionnelle[6].
Le
traité d’Amsterdam de 1997 a offert le cadre institutionnel pour s’efforcer à
améliorer la coopération judiciaire en matière civile. Le Projet d’action de
Vienne, adopté en 1998 par le Conseil et la Commission communément, a créé la
base d’action concertée pour les 5 ans suivants.
C’était
le sommet de Tampere sur l’Espace judiciaire européen, en 1999, quelques mois
après l’entrée en vigueur du Traité d’Amsterdam, qui a « sonné » la
nécessité de la création d’un droit procédural européen pour les litiges
internationaux. C’est alors que la création d’un tel droit est devenue objectif
prioritaire pour les Etats membres[7].
La base juridique
du règlement 1348/2000 est l’article 65 du Traité d’Amsterdam, lequel article
autorise les institutions de la Communauté prendre les mesures indispensables
pour le fonctionnement sans problèmes du marché intérieur, dans le champ de la
coopération judiciaire en matière civile transfrontière intracommunautaire[8]. Peu
après le traité d’Amsterdam, la Commission avait présenté en application de
l’article 67 du traité, un projet de directive du Conseil relative à la
signification et à la notification dans les Etats membres de l’Union européenne
des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile ou commerciale
reprenant, sous réserve des adaptations nécessaires, le contenu de la
convention.
Très rapidement,
à la demande d’une large majorité d’Etats membres, les travaux se sont orientés
vers l’élaboration d’un règlement et le Conseil a finalement adopté, le 29 mai
2000, le règlement (CE) no 1348/2000 relatif à la signification et à la
notification dans les Etats membres des actes judiciaires et extrajudiciaires
en matière civile et commerciale[9].
Au début, le
Danemark n’était pas parti à ce règlement. Toutefois, le 19.10.2005 il a passé
un accord avec la Communauté européenne, par lequel il accepte que le règlement
1348/2000 lui soit appliqué.
Entre les Etats
membres de la Communauté européenne, le règlement 1348/2000, qui est entré en
vigueur le 31 mai 2001, à compter de cette date prévaut sur les autres traités,
bilatéraux et multilatéraux, conclus par les Etats membres (article 30
paragraphe 1), et remplace notamment la Convention de la Haye de 15 novembre
1965 sur les notifications à l’étranger ainsi que l’article IV du Protocole
annexé à la Convention de Bruxelles. L’article 20 paragraphe 1 du
règlement, fait allusion particulièrement à la Convention de la Haye.
La raison du
remplacement des autres traités par le règlement était la plus grande
efficacité de la notification qu’on espère réussir à travers les dispositions
du règlement. Des procédures meilleures de coopération entre les autorités
nationales sont prévues et par cela la transmission pour la notification se
fait plus rapidement.
Puisque le
règlement 1348 s’applique aux
significations ou notifications d’un Etat membre à un autre Etat membre, les
instruments antérieurs qui sont en vigueur entre un ou plusieurs Etats membres
et un ou plusieurs Etats tiers continueront à s’appliquer à la notification
d’un Etat membre à un Etat tiers et vice versa. Bien entendu, les dispositions
du droit interne concernant la coopération internationale sont toujours
applicables au mesure qu’elles ne sont pas remplacées par le règlement 1348
entre les Etats membres ou par autres instruments internationaux entre les
Etats membres et Etats tiers[10].
Bien que le
règlement prévaut sur tout autre accord ou arrangement, l’article 20 paragraphe
2 permet aux Etats membres à maintenir ou à conclure accords ou arrangements
« visant à accélérer ou à simplifier la transmission des actes, pour
autant qu’ils soient compatibles avec le présent règlement »[11].
On doit encore
signaler ici, que le règlement est en vigueur dans les nouveaux Etats membres
des Communautés européennes, dès 2004[12].
Caractère du règlement
Le
règlement est applicable en matière civile ou commerciale lorsqu’un acte
judiciaire ou extrajudiciaire doit être transmis d’un Etat membre à un autre
pour y être signifié ou notifié (article 1-1).
Le
texte même ne donne aucune définition de ce qu’il faut entendre par matière
civile et commerciale. Comme il est signalé, la notion de matière civile et
commerciale doit être interprétée de façon autonome, comme c’est le cas avec la
Convention de Bruxelles[13], sur
laquelle la Cour de justice a jugé (arrêts Eurocontrol et Rüffer)
que les notions de matière civile et commerciale doivent être interprétées en
faisant référence aux objectifs et au système de cette Convention, en tenant
compte des principes généraux qui se dégagent de l’ensemble des systèmes
nationaux.
Selon l ’article 1 paragraphe 2, le règlement ne
s’applique pas lorsque l’adresse du destinataire de l’acte n’est pas connue,
lorsque le destinataire est inconnu.
Puisque
la Convention de La Haye ne s’applique non plus lorsque le destinataire est
inconnu, ce sera la lex fori étrangère qui répondra à la question
comment est-ce que dans ces cas-là la signification ou la notification se fait.
Ce
sera aussi la lex fori étrangère qui dira si la signification ou la
notification publique à l’étranger est permise. D’ailleurs, aux cas où les
tribunaux étrangers procèdent à une signification ou une notification publique
trop vite ou la signification ou notification se heurte à l’ordre public
interne pour d’autres raisons, la reconnaissance de l’arrêt étranger
conformément à l’article 34 –1 du règlement Bruxelles 1 ou à l’article 15 para.
1 no 1 du règlement Bruxelles II sera en risque[14].
On
dit, et on a raison, que les intérêts qu’on doit « soigner » en l a notification internationale font un triangle
magique : Ce sont notamment la protection du demandant par une
signification rapide et simple, état de droit et droit de défense du défendeur
ainsi que la souveraineté des Etats concernés.
Le
règlement 1348/2000 est le résultat – heureux pour la plupart des juristes[15] - d’une
restriction des intérêts étatiques de souveraineté.
La
principale caractéristique du règlement est la transmission directe entre les
entités compétentes. Toutefois, des méthodes de notification secondaires et
complémentaires sont prévues. Par conséquent, l’unification réalisée par le
règlement est d’envergure limitée. Cette structure du texte a provoqué jusqu’à
maintenant des réactions diverses de la part de la théorie[16].
Autorités compétentes
Les
Etats membres désignent les entités compétentes pour la transmission directe et
réception de l’acte qui doit être notifié d’un Etat membre à un autre.
Selon l ‘article 2 du règlement, chaque Etat membre
désigne les officiers ministériels, autorités ou autres personnes qui sont
compétents pour procéder à la transmission des actes aux fins de signification
ou notification dans un autre Etat membre. Ce sont les entités d’origine.
Chaque
Etat membre désigne aussi, respectivement, les entités requises, qui
sont compétents pour recevoir les actes judiciaires ou extrajudiciaires en
provenance d’un autre Etat membre.
Le
règlement ne précise pas quelles sont ces autorités compétentes. Certains Etats membres ont
désigné le Ministère de la Justice. D’autres Etats membres ont désigné des
entités décentralisés, comme les huissiers de justice. La même autorité
peut être désignée à la fois entité d’origine et entité requise.
Il est aussi possible de désigner plusieurs entités de chaque catégorie, par
exemple dans les Etats fédéraux.
Les Etats membres
désignent aussi une Entité Centrale la compétence de laquelle se limite
à l’appui à la transmission effective de l’acte. Notamment, elle est
« chargée de fournir des informations aux entités d’origine, de rechercher
des solutions aux difficultés pouvant se présenter lors d’une transmission
d’acte et, dans des cas exceptionnels, de faire parvenir elle-même, à la
requête de l’entité d’origine, une demande de signification ou notification à
l’entité requise compétente (art 3) »[17].
L’entité
centrale est un des points auxquels diffèrent le règlement et la Convention
de La Haye. Dans le système de la Convention de la Haye, la caractéristique
principale est la transmission de l’autorité centrale de l’Etat requis.
L’autorité centrale est une autorité requise qui reçoit la demande de
notification et le document par l’Etat contractant d’où vient le document, et
notifie ou fait notifier ledit document.
Au contraire, la
principale caractéristique du règlement est la transmission directe entre les entités
d’origine et les entités requises désignées par chaque Etat membre.
L’entité centrale de chaque Etat membre a seulement des fonctions
exceptionnelles de soutien à la transmission effective.
Actes judiciaires et extrajudiciaires
Le règlement ne
donne aucune définition sur les actes qui doivent être signifiés à l’étranger.
D’après un avis, ce sujet là est réglé exclusivement par la lex fori.[18]
Néanmoins,
on peut dire que la notion d’acte judiciaire est claire, puisqu’il y a un l ien évident avec un procès judiciaire. Ce n’est
pas le cas pour les actes extrajudiciaires, qui peuvent être considérée
différemment d’un Etat à l’autre. On propose ainsi que l’interprétation doit
être fondée sur l’effet utile du règlement : ça veut dire que le règlement
est applicable à tout acte dont la nature ou l’importance requièrent qu’il soit
transmis par une voie officielle[19].
C’est toujours
possible que selon l a lex fori
il ne soit pas besoin qu’un acte soit signifié à l’étranger, bien que le
destinataire habite à l’étranger. Par exemple, selon
l e droit allemand (par. 177 ZPO) il est permis de signifier
un acte au destinataire étranger s’il se trouve par hasard en Allemagne. Dans
ce cas-là il ne s’agit pas de signification à l’étranger et le règlement ne
s’applique pas. Selon l ’opinion
dominante des juristes allemands, dans ce cas-là la traduction de l’acte n’est
pas nécessaire.
Langues à utiliser
Le
règlement prévoit des règles bien précises sur les langues à utiliser pour
compléter le formulaire. Il doit être compléter dans la langue du lieu où la
notification ou la signification aura lieu ou dans une autre langue des
institutions de l’Union Européenne dans laquelle l’autorité requise a indiqué
qu’elle peut accepter[20].
Ce
n’est pas clair quelle langue on doit utiliser, au cas où le destinataire de la
signification du document soit une personne morale. D’après une opinion, dans
ce cas-là ça dépend des connaissances de langue de la personne autorisée à
recevoir de tels documents, et s’il s’agit d’une société anonyme, ça dépend des
connaissances de langue du Conseil Administratif[21]. D’après
une autre opinion, ce sera la lex societatis qui répondra à cette
question[22]. Il y a
aussi des vois qui disent que cette disposition ne peut pas être applicable aux
personnes morales.
Traduction
En
vertu de l’article 5, « le requérant est avisé par l’entité d’origine à
laquelle il remet l’acte aux fins de transmission que le destinataire peut
refuser de l’accepter s’il n’est pas établi dans l’une des langues indiquées à
l’article 8 ».
L’article
8 prévoit que : « L’entité requise avise le destinataire qu’il peut
refuser de recevoir l’acte à signifier ou à notifier s’il est établi dans une
langue autre que l’une des langues suivantes :
a)
la langue officielle de l’Etat requis ou, s’il existe
plusieurs langues officielles dans cet Etat membre requis, la langue officielle
ou l’une des langues officielles du lieu où il doit être procédé à la
signification ou à la notification
b)
une langue de l’Etat membre d’origine comprise du
destinataire.
Déjà dans le
considérant 10 du Préambule est précisé que « afin de défendre les
intérêts du destinataire, il convient que la signification ou la notification
se fasse dans la langue ou l’une des langues officielles du lieu où elle sera
effectuée ou dans une autre langue de l’Etat membre d’origine que le
destinataire comprend.
Le demandeur peut
donc choisir entre la langue de son Etat si elle est comprise du destinataire
ou la langue de l’Etat où l’acte doit être délivré.
On observe que le
règlement, quant à la traduction des actes à signifier ou à notifier, est plus
flexible que la Convention de La Haye de 1965. La signification ou la
notification peut aussi être faite sans traduction. Il suffit que le
destinataire comprenne la langue dans laquelle le document soit écrit[23]. Un
devoir de traduction de l’acte à signifier ou à notifier, naît ex nunc,
au cas où le destinataire refuserait de le recevoir. Jusqu’à ce que le
destinataire exerce son droit de refus, la signification ou la notification
d’un acte qui ne soit pas traduit, n’est pas considérée comme erronée et peut
avoir conséquences juridiques[24].
Cet article est
un des points du règlement qui font réagir les juristes européens, puisqu’il
crée des incertitudes. D’abord, comme il est signalé, il ne précise pas les
conditions d’exercice dudit refus, c’est à dire, il ne prévoit pas dans quel
délai et sous quelles formes le destinataire doit exprimer ce refus. En plus,
« il ne précise pas de quelle façon s’établit la preuve de la
méconnaissance de cette langue par le destinataire de l’acte »[25].
D’abord, quand
même, se pose la question comment est-ce qu’on peut informer le destinataire
sur la possibilité de refus de recevoir l’acte, particulièrement quand la
signification ou la notification se fait par la voie postale (et dans la
plupart des cas, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception).
C’est une question qui est laissée ouverte par le règlement. On propose la
création d’une règle nationale, selon l aquelle
serait garanti que le destinataire sera informé de la langue de l’acte ainsi
que de son droit à refuser de le recevoir, avant qu’il signe l’avis de
réception de la lettre recommandée[26].
Au cas où le
destinataire ne saurait pas au moment de la réception de l’acte, qu’il avait le
droit de la refuser, il doit avoir la possibilité de renvoyer l’acte au
destinataire, même après l’avoir reçu. C’est ce qui est fait en Allemagne, où
le nouvel article 1070 du Code Civil, lequel article est entré en vigueur le
1.4.2004, prévoit la possibilité de renvoyer un acte transmis d’un autre Etat membre,
même après l’avoir reçu, dans un délai de deux semaines.
Toutefois, même
si cette question puisse être réglée, il y a d’autres questions qui créent de
difficultés.
Ce n’est pas
clair, par exemple, quelles seront les conséquences au cas où, au moment de la
réception de l’acte, le destinataire ne comprendrait pas vraiment l’acte, quand
même il ne se serait pas suffisamment informé sur son droit de renvoyer l’acte
et pour cette raison il ne le ferait. Selon un avis qui paraît très logique, si
le destinataire fait traduire l’acte à la suite, et comme ça s’informe sur son
contenu, alors la signification ou la notification doit être considérée comme
valable. Le destinataire n’a pas, dans ce cas-là, besoin de protection.
Au contraire, il
n’y a pas de solution au cas où le destinataire, qui n’est pas informé sur son
droit de refuser la réception de l’acte, ne comprend pas l’acte et par
conséquent n’apparaît au procès. Dans ce cas-là, on signale que la décision du
tribunal ne serait pas reconnue selon l ’article
34 No 2 du règlement 44/2000, puisque le défendeur n’aurait pas pu se défendre.
Quand même, la
non reconnaissance d’une décision n’est pas toujours un protection suffisante,
comme on observe[27]. Il se
peut qu’il y ait de risques pour le destinataire. Le tribunal qui aurait
prononcé la décision ainsi que le tribunal qui serait compétent pour la
reconnaissance de la décision pourraient supposer que la connaissance de la
langue de l’acte par le destinataire aurait été suffisante. Ce serait encore le
cas où le destinataire aurait la charge de la preuve. C’est ce que plusieurs
commentateurs (Schlosser) du Règlement soutiennent, en raisonnant que le
destinataire a seulement un droit de refus de recevoir l’acte. D’autres, au
contraire, soutiennent que c’est le requérant demandeur qui devrait avoir la
charge de la preuve que la signification ou la notification aurait été
justement faite.
Il se peut aussi,
on signale, qu’un l itige survienne
sur la qualité de la traduction, voire sur la capacité du destinataire de comprendre
la langue de l’Etat d’origine lorsque l’acte est rédigé dans cette langue. Dans
ce cas-là, le tribunal devrait trancher la contestation portant sur la validité
de la signification[28].
On a déjà signalé
que le règlement n’ordonne rien sur les conséquences du refus de recevoir
l’acte transmis. C’est aussi mentionné, clairement, dans le rapport explicatif
du règlement.
Avant l’arrêt Leffler,
en essayant d’approcher ce problème, on soutenait que les conséquences, dans ce
cas-là seraient réglées par la loi nationale. Ainsi, par exemple, on disait
qu’au cas où le destinataire refuserait de recevoir l’acte, il n’y aurait pas
de problème, puisqu’on considérerait que la signification ou la notification
aurait été faillie et on aurait la possibilité de la répéter et y adjoindre une
traduction. Dans ce cas-là, les délais éventuels que le requérant devrait
observer, continueraient à courir.
Pour cette raison, on soutenait que,
si le destinataire avait de doutes en ce qui concerne la suffisance de ses
connaissances de la langue de l’acte, ce serait mieux de le recevoir. Selon cet
avis, tant qu’il n’y aurait pas de critères généraux pour confirmer que le
destinataire connaît suffisamment la langue de l’acte, le refus de recevoir
l’acte serait trop risqué.
En général, on soutenait que le
silence du règlement, quant à un éventuel remède des défauts de signification
ou de notification, ne devrait pas être interprété comme prohibition de remède.
On espérait alors, que la Cour de justice des Communautés européennes, en appliquant
le règlement, se prononcerait pour un principe de remède par connaissance du
contenu de l’acte[29].
Date de la signification ou de la notification
Le
règlement a osé « synchroniser les deux bras nationaux » de la
procédure de la transmission à signification ou notification, chacun desquels
étant régi par la loi territoriale respective. Comme ça, bien que la règle
générale soit que la date de la signification ou de la notification d’un acte
est celle à laquelle l’acte a été signifié ou notifié conformément à la
législation de l’Etat membre requis (article 9-1), l’article 9-2 prévoit que si
le droit national du tribunal saisi fixe un délai déterminé pour la
signification ou la notification d’un acte, la date à prendre en considération
(à l’égard du requérant) comme date de signification ou notification est la
date de signification ou notification faite selon ce droit, indépendamment de
la date à laquelle la dite signification ou notification a été effectuée
vraiment.
Ce
fait permet au droit procédural national à déconnecter la date légale selon l a loi de procédure, de la date réelle de la
signification ou de la notification, en prenant en considération que la
signification ou la notification s’effectue à l’étranger, et que par là peut
facilement s’échapper du control du requérant.
Le
fait qu’en général la date de la signification ou de la notification est celle
prévue par l’Etat membre requis, est juste pour le destinataire qui peut se
référer à « son » droit pour calculer les délais dans lesquels il peut
comparaître ou contester la demande dressée contre lui. Tout de même, ce fait
peut être injuste pour le requérant au cas où la loi de procédure prévoit un
délai déterminé auquel le requérant doit se conformer.
La
raison qu’on critique l’article 9 est que la paragraphe 3 permet à tout Etat
membre de déroger aux dispositions des
paragraphes 1 et 2. D’abord on peut le faire pendant une période de transition
de cinq ans (« pour des motifs valables »), mais à la suite on peut
renouveler cette période de transition tous les cinq ans pour des raisons
tenant à son système juridique.
Beaucoup
d’Etats membres l’ont fait : Espagne, Finlande, Pays Bas, Irlande,
Portugal, Royaume Uni, Suède, Lituanie, Malta, Pologne, Slovénie, Hongrie, ont
déclaré que, pour de raisons variées, et en conformité avec l’article 9-3 du
règlement 1348, l’article 9-2 ne s’applique pas, alors pour ces Etats la
question de la date de la signification ou de la notification est réglée par la
loi nationale. Deux autres Etats membres, la France et la Belgique, ont étendu
l’article 9-2 aux documents extrajudiciaires ainsi qu’aux cas où il n’y a pas
de délai déterminé pour la signification ou la notification[30].
C’est
une question bien différente, quelle date doit-on prendre en considération pour
calculer le délai que le destinataire de la signification ou de la notification
dispose, aux cas fréquents où, parallèlement à l’utilisation de la méthode
principale de transmission, on a utilisé une autre méthode aussi. C’est une des
questions posées devant la Cour de justice des Communautés européennes, au cas
Plumex.
Autres moyens de transmission et de
signification ou de notification des actes judiciaires
Signification ou notification par la poste
En
vertu de l’article 14, chaque Etat membre a la faculté de procéder directement
par la poste à la signification ou à la notification des actes judiciaires aux
personnes résidant dans un autre Etat membre (paragraphe 1). Tout Etat membre
peut préciser, conformément à l’article 23, paragraphe 1, sous quelles
conditions il acceptera la signification ou la notification des actes
judiciaires par la poste (paragraphe 2).
La
plupart des Etats membres ont précisé qu’ils accepteront la transmission de
l’acte par voie postale si elle est faite par lettre recommandée avec demande
d’avis de réception.
D’après
le rapport de 2004 de la Commission européenne, adressé au Parlement européen,
dans 55 % des cas, la notification se fait par voie postale, ce qui crée
parfois des difficultés ; par exemple, on ne peut pas déchiffrer la
signature ou on ne retourne pas l’accusé de réception ou l’accusé de réception
est rempli de façon incomplète.
En
vertu de l’article 34 point 2 du règlement 44/2001, une décision n’est pas
reconnue si l’acte introductif de l’instance n’était pas signifié ou notifié au
défendeur, d’une manière qu’il pourrait se défendre[31].
Différemment de l’article 27 point 2 de la Convention de Bruxelles, on ne requiert pas la régularité formelle de
la signification ou de la notification, mais simplement la faculté pour le
défendeur de s’informer et, par conséquent, d’être écouté, de se défendre[32]. Cette
faculté est assurée quand la lettre est reçue par des personnes à la maison ou
au bureau du défendeur. S’il n’est pas possible rencontrer le défendeur, on l aisse une note disant qu’on devra aller prendre
la lettre à la Poste. Toutes ces circonstances parlent, prima facie, pour la
faculté du défendeur de s’être informé et de prendre connaissance de l’acte pour qu’il puisse se défendre. Au
cas de procédure de reconnaissance de décision, selon
l es règles du règlement 44/2001, ce sera le défendeur qui
devra invoquer et prouver l’opposition, qu’il n’a eu aucune connaissance de la
lettre recommandée.
En
plus, la Poste protocole la signification ou la notification par lettre
recommandée avec demande d’avis de réception, pour qu’au cas où la lettre soit perdue, on peut
« reconstruire », pour ainsi dire, la procédure de la signification
ou de la notification[33].
Demande directe de signification ou de notification
Le
règlement précise à l’article 15, paragraphe 1, qu’il « ne fait pas
obstacle à la faculté, pour toute personne intéressée à une instance
judiciaire, de faire procéder à la signification ou à la notification d’actes
judiciaires directement par les soins des officiers ministériels,
fonctionnaires ou autres personnes compétents de l’Etat membre requis ».
Selon paragraphe 2 du même article, chaque Etat membre peut faire savoir qu’il
est opposé à la signification ou à la notification des actes judiciaires sur son
territoire en application du paragraphe 1.
Une
étude préparatoire, faite par ordre de la Commission, montre assez clairement
que cette mode de signification ou notification ne s’utilise que rarement, à
cause de plusieurs facteurs, comme, par exemple, une certaine manque de clarté
de la règle, laquelle ne donne pas une définition de la notion de
« demande directe de signification ou de notification », ni clarifie
qui seraient les « autres personnes compétents de l’Etat membre
requis ».
D’ailleurs,
comme on signale, ce n’est pas un motif secondaire du peu de succès de cet
article, le fait que beaucoup d’Etats membre ont utilisé la faculté que la
paragraphe 2 leur donne et ont communiqué leur opposition à la signification ou
à la notification des actes judiciaires, par cette manière, sur leurs
territoires. Ainsi, l’Autriche, La République Chèque, l’Angleterre, le Galles
et l’Irlande de Nord, l’Estonie, l’Allemagne, l’Hongrie, la Lituanie, la Pologne, le Portugal, la Slovaquie et la
Slovénie ont communiqué leur susdite opposition, et le Luxembourg a déclaré
qu’il ne s’oppose à telle possibilité de signification ou de notification, mais
à condition de réciprocité[34].
Défendeur non comparant
Le
texte du règlement à ce point (article 19) reproduit la rédaction du texte de
la Convention de La Haye (articles 15 et 16) exactement presque, avec des
différences mineures. Le règlement protège le défendeur non comparant,
interdisant au juge de statuer – exceptés les cas de mesures provisoires ou
conservatoires – jusqu’à ce qu’il soit établi que l’acte ait été signifié ou
notifié selon l es formes prescrites
par la législation de l’Etat membre requis ou que l’acte ait été effectivement
remis au défendeur ou à sa résidence selon un autre mode prévu par le présent
règlement.
Toutefois,
on devrait protéger aussi le requérant et pas seulement le défendeur. C’est
pourquoi l’article 19-2 prévoit que tout Etat membre peut faire savoir à la
Commission européenne que ses juges pourront malgré tout statuer si un certain
nombre de conditions précises sont réunies, même si aucune attestation
constatant signification, notification ou remise de l’acte n’a été reçu. Les
conditions sont que : a) l’acte ait été transmis selon un des modes prévus
par le présent règlement, b) un délai, que le juge appréciera dans chaque cas
particulier et qui sera d’au moins six mois, se soit écoulé depuis la date
d’envoi de l’acte, c) aucune attestation n’ait pu être obtenue nonobstant
toutes les démarches effectuées auprès des autorités ou entités compétentes de
l’Etat requis. Quelques Etats membres n’ont pas utilisé cette faculté.
Le
règlement protège le défendeur qui n’ait pas comparu pendant le procès, et
qu’une décision ait été rendue contre lui, en autorisant le juge de relever le
défendeur de la forclusion résultant de l’expiration des délais de recours, si
le défendeur réagit dans un délai raisonnable à partir du moment où le
défendeur ait eu connaissance de la décision.
Le
sus-dit délai peut-être établi par les Etats membres et ne peut être inférieur
d’un an à compter du prononcé de la décision. La majorité des Etats membres ont
fixé le délai d’un an, quelque uns quand même, l’ont rallongé en plus du minime
prévu par le règlement. Ainsi, par exemple, l’Autriche a établi un délai
illimité, et la Grèce a établi un délai de 3 ans.
Frais de signification
L’article
11 du règlement énonce que les significations ou notifications d’actes
judiciaires en provenance d’un autre Etat membre ne peuvent donner lieu au
paiement de taxes ou frais pour les services de l’Etat membre requis.
On
signale à ce point, qu’avant l’entré en vigueur du règlement, les
significations ou notifications à l’étranger – Union européenne ne supposaient
presque jamais de frais, puisqu’il y avait d’accords bilatéraux respectifs.
Selon cet avis, le règlement a, en réalité, augmenté les frais. Cette
conséquence est due à un champ juridique changé : Premièrement, le
règlement prévaut sur les accords bilatéraux, lesquels prévoient un renoncement
mutuel des frais, au cas où ce n’est pas entendu que ces accords continueront à
s’appliquer (article 20 II). Deuxièmement, les Etats Benelux ont, presque
simultanément avec l’entrée en vigueur du règlement, privatisé leur Gerichtsvollzieherwesen.
Dans
d’autres Etats membres aussi il existe une profession
l ibérale, telle que celle des huissiers de justice, qui est
autorisée à signifier les actes. Les membres de cette profession facturent des
frais pour cette prestation.
En
France, par exemple, les actes sont systématiquement signifiés par des
huissiers de justice, ainsi que le Manuel établi par la Commission prévoit,
pour la France, qu’une perception d’une provision de 69 euros doit accompagner
la transmission d’un acte en vue de sa signification en France, sauf si le
demandeur bénéficie de l’assistance judiciaire.
Relation – coordination du règlement 1348/2000 le règlement 44/2001
Un
autre fait intéressant et important, sur lequel on met l’accent est que les
questions soulevées par l’application des dispositions du règlement 1348,
relatives à la langue dans laquelle l’acte à signifier ou à notifier doit être
établi et les droits du destinataire au cas où il refuse de recevoir l’acte
(articles 5 et 8), s’accompagnent fréquemment des autres questions soulevées
par le fait d’un l itige contemporain
entre les mêmes parties dans un autre Etat membre, créant, ainsi, l’hypothèse
de litispendance ou de connexion[35].
Dans
ces cas-là, se pose le problème de la coordination nécessaire des dispositions,
d’un côté du règlement 1348/2000 et de l’autre côté du règlement 44/2001. Plus
particulièrement, la question est, en quelle mesure le juge de la deuxième
procédure doit ou peut évaluer la validité et la conformité aux règles de la
signification ou de la notification de l’acte introductif de la procédure
devant le premier juge.
Reforme du règlement
Les
dispositions du règlement qui posent de problèmes assez grands, sont l’article
8 (refus de recevoir l’acte), l’article 14 ( signification ou notification par
la poste) et l’article 15 ( demande directe de signification ou notification).
Des
commentaires fervents, accentuent les problèmes, que le règlement a créé – ou,
qu’il a laissé subsister – et demandent en urgence sa réforme. Ils soutiennent
que « plusieurs secteurs ont besoin d’être réglementés : toutes les
questions relatives à la langue (nécessités de traduction par analogie à
l’article 8 du règlement …..), l’information du destinataire (sur les
conséquences juridiques de l’acte de notification et son droit de refuser la
notification en cas de non-respect des formalités requises) et la création d’un
formulaire pour la notification directe par voie postale, qui pourrait fournir
au destinataire les informations nécessaires. Une alternative serait de
prévoir, pour les notifications directes par la poste, une enveloppe unique sur
laquelle les informations nécessaires apparaîtraient en caractère gras dans la
langue du lieu de la notification. La disposition l acunaire
de l’article 14 de règlement …… montre clairement que la seule autorisation de
mesures juridictionnelles à l’étranger ne répond pas par elle-même aux besoins
légitimes de protection des justiciables locaux[36].
L’article
8 laisse vraiment beaucoup de questions sans réponse. On dit que cet article
est la tâche noire du règlement 1348[37].
Certaines des questions ouvertes sont les suivantes :
Au
cas où la traduction soit d’une qualité pauvre, est-ce qu’elle peut être
considérée comme appropriée au sens de l’article 8(1) du règlement ?
Est-ce que ça suffit que le destinataire simplement comprenne l’acte traduit
qui lui soit signé ou requiert-on que la traduction soit parfaite, sans aucune
faute ? Et comment est-ce qu’on peut dire quel est le minimum requis de la
traduction ? Est-ce suffisant que la traduction donne la possibilité au
destinataire, éventuellement avec un certain effort, de s’informer sur le
contenu de l’acte et de réagir conformément ? Les problèmes augmentent si
on accepte un standard pas très haut et pas très bas non plus[38], parce
qu’alors la situation n’est pas très claire et la marge de l’interprétation est
grande.
C’est
vrai que les positions des Etats membres sur le problèmes posés par l’article
8, sont divergentes. Lors de la réunion du comité consultatif, prévu par
l’article 18 du règlement (paragraphe 1 : « La Commission est
assistée par un comité ») et convoqué par la Commission en avril 2004, les
délégations ont exprimé des points de vue divergents sur la question de savoir
s’il convient d’introduire dans le règlement des règles concernant un délai de
refus de réception d’un acte et les conséquences juridiques d’un tel refus.
Certains ont plaidé en faveur de l’adoption de règles à cet effet, certains ont
soutenu que la question devait être réglée par le droit national et d’autres
ont soutenu que la question méritait une réflexion plus poussée.
Face
à ces problèmes, la Commission avait commandé une étude sur l’application du
règlement, étude réalisée par un contractant, pour l’utiliser comme base au
rapport qu ‘elle a ensuite élaboré. L’étude était commandé, conformément à
l’article 24 du règlement qui dispose que : « Au plus tard le 1er
juin 2004, et ensuite tous les cinq ans, la Commission présente au Parlement
européen, au Conseil et au Comité économique et social un rapport relatif à
l’application du présent règlement portant notamment sur l’efficacité des
entités désignées en application de l’article 2 ainsi qu’à l’application
pratique de l’article 3, point c), et de l’article 9. Ce rapport est
accompagné, le cas échéant, de propositions visant à adapter le présent
règlement à l’évolution des systèmes de notification ».
L’étude,
réalisée entre décembre 2003 et février 2004, concluait, entre autres, que le
règlement a accéléré la transmission et la signification ou notification des
actes ; que, grâce à l’amélioration de la coopération judiciaire entre
Etats membres, a contribué de manière notable à la création d’un Espace
judiciaire européen ; qu’il y a nécessité de former les professionnels
intervenant dans l’application du règlement, parce qu’ils n’ont pas encore une
connaissance suffisante de celui-ci.
Le
11 juillet de 2005 la Commission a adopté une proposition de règlement du
Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement 1348/2000 et qui a été
soumise à la procédure de délibération prévue à l’article 251 du traité de
l’Union européenne[39].
Le
Parlement européen a confié l’examen de la proposition à sa commission
juridique, qui a approuvé son rapport le 2 février 2006. Le 14 février 2006, le
Comité économique et social européen a rendu son avis sur la proposition. A sa
session du 1er juin 2006, le Conseil a dégagé un accord global sur
le libellé du règlement et a suggéré de présenter une version coordonnée du
texte. Le 4 juillet 2006, le Parlement européen a adopté l’avis du Conseil
approuvant la proposition de la Commission moyennant un certain nombre
d’amendements et a invité la Commission à présenter une version coordonnée et
complète du règlement intégrant les amendements au moyen de sa proposition
révisée.
La
proposition modifiée, alors, à la date de 1.12.2006, adapte la proposition
initiale de la Commission à l’accord global du Conseil et à l’avis du Parlement
européen dans une version codifiée.
La
Commission propose certaines modifications au texte actuellement en vigueur.
Elle veut d’abord raccourcir les délais de signification et notification en
créant une obligation de procéder à la signification ou à la notification dans
le mois suivant la réception de l’acte par l’entité requise. Elle veut aussi
harmoniser les délais en supprimant la référence à la législation des Etats
membres. Objectif principal est le renforcement de la sécurité juridique, tant
pour le requérant que pour le destinataire[40].
Alors,
comme on précise, les modifications envisagées par la proposition consistent
avant tout à :
-
prévoir que l’entité requise procède à la notification ou
à la signification en tout état de cause dans un délai d’un mois à compter de
la réception du dossier ;
-
créer un nouveau formulaire tendant à informer le
destinataire de l’acte de la possibilité de refuser un acte remis dans un délai
d’une semaine à compter de la signification ou de la notification ;
-
clarifier la question de la date de signification ou de
notification ;
-
imposer que les frais de signification ou de notification
occasionnés par l’intervention d’un officier ministériel ou de toute autre
personne compétente selon l a loi de
l’Etat membre requis correspondent à un droit forfaitaire déterminé par avance
par le droit de l’Etat membre requis ( en respectant deux règles, celle de
proportionnalité et celle de non discrimination) ;
-
enfin, édicter des conditions uniformes concernant la
signification ou la notification des actes judiciaires par l’intermédiaire des
services postaux (lettre recommandée avec accusé de réception ou envoi
équivalent) [41]. La
Commission est d’avis qu’il conviendrait de clarifier le fait que le régime
linguistique posé à l’article 8 s’applique aussi à la signification ou
notification par voie postale. Des précisions additionnelles sont prévues pour
créer un régime identique dans tous les Etats membres en ce qui concerne le
régime des langues de l’acte à signifier ou à notifier dans un autre Etat
membre par la poste.
Il reste, on
signale, des ambiguïtés qu’on devrait essayer à éliminer, puisque la correcte
application des règles issue de la communautarisation de la coopération
judiciaire en matière civile, ainsi que la réalisation concrète d’un espace
judiciaire européen dépendent, en grande partie, du respect du principe de la
certitude du droit[42].
On soutient,
quant même, de l’autre côté, que « les travaux en cours permettront de
procéder à certains ajustements qui auront l’avantage de polir certains aspects
de la fonctionnalité essentiellement pratique du règlement ». Que,
d’ailleurs, « à terme, il n’est pas exclu qu’il soit nécessaire de
réfléchir à la possibilité d’utiliser de nouveaux moyens électroniques de
communication pour la signification et la notification des actes »[43].
La proposition de
la Commission, on avoue, renforcera l’effectivité du règlement, surtout par le
fait que la traduction de l’acte ne sera pas de façon absolue requise et aussi
par le fait de l’introduction du délai d’un mois à compter de la réception du
dossier, pour la signification ou la notification de l’acte[44]. En
plus, on doit considérer comme très positives les modifications survenues à l’article
8, et notamment : d’abord, le fait que « l’entité requise informe le
destinataire, au moyen du formulaire type figurant à l’annexe I, qu’il
peut refuser de recevoir l’acte à signifier ou à notifier, … » et en
suite, que celui-ci peut faire ça « soit au moment de la signification ou
de la notification, soit en envoyant l’acte à l’entité requise dans un délai
d’une semaine, … » (paragraphe 1).
Il paraît, alors,
que la proposition de la Commission à modifier le règlement 1348/2000 doit être
positivement reçue.
[1] B. Hess, Die
„Europäisierung“ des internqtionqlen Zivilproze0rechts durch den Amsterdamer
Vertrag – Chancen und Risiken, Neue Juristische Wochenschrift 2000, 23.
[2] B. Sujecki, Das
Übersetzungserfordernis und dessen Heilung nach der Europäischen
Zustellungsverordnung, Zeitschrift für Europäisches Privatrecht 2007,
353, 356.
[3] H. Linke, Die
Probleme der internationalen Zustellung, in: Grundfragen der
Gerichtsverfassung – Internationale Zustellung (Hrsg. P. Gottwald),
Bielefeld 1999, 95, 98.
[4] J. Kondring,
Voraussetzungen, Wirkung, Wirksamkeit und Rechtswirkung der Zustellung: Eine
scheinbar babylonische Begriffsverwirrung um fas auf die internationale
Zustellung anwendbare Recht. Zugleich ein Beitrag zur entgegenstehenden
Rechtshängigkeit, IPRax 2007, 138, 139.
[5] Sur cette
Convention, v. A. Borrás, El nuevo Convenio relativo a la notificación o
traslado en l os Estados miembros de
la Unión Europea de documentos judiciales y extrajudiciales en materia civil o
mercantil, hecho en Bruselas el 26 de mayo de 1997, Revista Española de
Derecho Internacional 1997-2, 346.
[6] F. Frattini,
European Area of Civil Justice – Has the Community Reached the Limits?, Zeitschrift
für Europäisches Privatrecht 2006, 225.
[7] B. Hess,
Nouvelles techniques de la cooperation transfrontière en Europe, Revue
Critique de Droit International Privé 2003, 215, 217.
[8] W.E. Lindacher,
Europäisches Zustellungsrecht. Die VO (EG) Nr. 1348/2000: Fortschritt,
Auslegungsbedarf, Problemausblendung, Zeitschrift für Zivilprozessrecht
2001, 179, 181.
[9] M.-O. Baur,
Notification des actes, in : Conseil de l’Union européenne.
Droit Civil. Coopération Judiciaire Européenne, 2004, 163, 166.
[10] J.-J. Forner,
El Reglamento 1348/2000: Algunos aspectos generales y aplicación en España,
......, 2005, 3.
[11] P. Meijknecht,
Impact of Time in the recent EC Regulations on International Civil Procedure, NILR
2003, 437, 445.
[13] A. Mourre, Droit
judiciaire privé européen des affaire. Droit communautaire – Droit comparé,
Paris 2003, 405.
[14] B. Heiderhoff, in: Europäisches
Zivilprozeßrecht. Kommentar (Hrsg. T. Rauscher), 2004, 779, 798-799.
[16] S.-D. Jastrow, Auslandszustellung
im Zivilverfahren – Erste Praxiserfahrungen mit der EG-Zustellungsverordnung, Neue
Juristische Wochenschrift 2002, 3382.
[17] E.R. Paulino
Pereira, Le règlement « (CE) no 1348/2000 du Conseil »
relatif à la signification et à la notification dans les Etats membres des
actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile et commerciale, L’Observateur
de Bruxelles, No 65, Juin 2006, 23, 24.
[23] R.A. Schütze,
Übersetzungen im europäischen und internationalen Zivilprozessrecht – Probleme
der Zustellung, RIW 2006, 352.
[25] A. Malan, La
langue de la signification des actes judiciaires ou les incertitudes du
Règlement dur la signification et la notification des actes judiciaires et
extrajudiciaires, Petites affiches 2003, No 77, 6.
[29] M. de Lind van
Wijngaarden-Maack, Internationale Zustellung nach der EuZVO und
internationale Zuständigkeit bei Klage auf Feststellung des Nichtbestehens eines
Exklusivvertriebsvertrages, IPRax 2004, 212, 219-220.
[31] La Cour de justice des Communautés
européennes (première chambre), à son arrêt du 14 décembre 2006, rendu dans
l’affaire C-283/05 ASML Netherlands BV contre Semiconductor Industry Services
GmbH, dispose que « L’article 34, point 2, du règlement (CE) no 44/2001 du
Conseil, du 22 décembre 2000, concernant la compétence judiciaire, la
reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, doit
être interprété en ce sens qu’un défendeur ne saurait être « en
mesure » d’exercer un recours contre une décision rendue par défaut à son
encontre que s’il a eu effectivement connaissance du contenu de celle-ci, par
voie de signification ou de notification effectuée en temps utile pour lui
permettre de se défendre devant le juge de l’Etat d’origine ».
[32] A. Stadler,
Förmlichkeit vor prozessualer Billigkeit bei Mängeln der internationalen
Zustellung?, IPRax 2002, 282, 285.
[34] M. Frigo,
Problemi applicativi della normativa comunitaria in materia di notificazioni di
atti giudiziari, Rivista di diritto internazionale privato e processuale
2006, 5, 10.
[38] Wilske/Krapflm Zur Qualität von
Übersetzungen bei Zustellung ausländischer gerichtlicher Schriftstücke, IPRax
2006, 10, 13.
[40] S. Guinchard/F.
Ferrand, Procédure civile. Droit interne et droit
communautaire, 28e éd., Paris 2006, 687.
[41] S. Guinchard/F.
Ferrand, Procédure civile. Droit interne et droit communautaire,
28e éd., 2006, 687-688.
[44] H. Rösler/V.
Siepmann, Die geplante Reform der europäischen
Zustellungsverordnung, RIW 2006, 512, 518.
Jurisprudence
récente de la Cour de justice des Communautés européennes concernant le
Règlement 1348/2000 relatif à la signification et à la notification dans les
Etats membres des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile et
commerciale
Elina MOUSTAIRA
Introduction
Le
règlement organise bien précisément la transmission des actes à signifier ou à
notifier, de l’entité d’origine vers l’entité requise, toutefois il reste muet
sur quelques questions de procédure qui, à première vue, paraissaient devoir
relever du droit national de chaque Etat membre.
Trois
telles questions, qui sont très importantes dans la pratique, ont été posées
devant La Cour européenne de justice, dans deux affaires, sur les points
suivants : 1) La sanction applicable en cas de refus du destinataire de
recevoir l’acte à signifier en raison d’une absence de traduction de celui-ci
dans une langue de l’Etat requis ou une langue de l’Etat d’origine qu’il comprend,
2) la hiérarchie éventuelle entre la voie « principale » de
transmission et les autres moyens de signification, et 3) la date à prendre en
considération en cas de pluralité de significations[1].
Les
deux arrêts sont assez liés quant à leur contenu. On signale aussi, que, vu les
très différents opinions, en ce qui concerne la possibilité de remédier les
fautes des significations ou notifications, ayant eu lieu à la base de règles
internationales, comme celles du règlement 1348/2000, on doit se réjouir du
fait que la Cour de justice s’est exprimée sur ça[2].
Affaire C-443/03, Leffler
M.
Leffler, par exploit du 21 juin 2001, a assigné en référé Berlin Chemie devant
le président du Rechtbank te Arnhem en vue d’obtenir la mainlevée de saisies
effectuées par cette société ainsi qu’une injonction interdisant à celle-ci de
procéder à de nouvelles saisies. Berlin Chemie a contesté la demande et, par
ordonnance du 13 juillet 2001, le président du Rechtbank a rejeté les demandes
de M. Leffler.
M.
Leffler a formé appel de cette décision devant le Gerechtshof te Arnhem. Berlin
Chemie a été citée à comparaître à l’audience d’introduction du Gerechtshof du
7 août 2001.
Pour
remédier à un vice de procédure, Berlin Chemie a dû être à nouveau citée à
comparaître, le 9 août 2001, à l’audience d’introduction du 23 août 2003.
Berlin n’a pas comparu à cette audience d’introduction.
M.
Leffler a sollicité un arrêt par défaut, mais le Gerechtshof a sursis à statuer
au motif que l’exploit de citation n’était pas conforme aux règles du code de
procédure civile néerlandais (Wetboek van
burgerlijke rechtsvordering) et au règlement.
Par
nouvel exploit de citation du 7 septembre 2001, Berlin Chemie a été citée à
comparaître àl’audience d’introduction du Gerechtshof du 9 octobre 2001. Berlin
Chemie n’a de nouveau pas comparu à l’audience fixée.
Le
Gerechtshof a une nouvelle fois sursis à statuer jusqu’au dépôt des actes
attestant le respect des conditions de l’article 19 du règlement à l’endroit de
la signification. Les actes en question ont été déposés à l’audience
d’introduction du Gerechtshof du 4 décémbre 2001.
Par
arrêt du 18 décembre 2001, le Gerechshof a refusé de statuer par défaut contre
Berlin Chemie comme le lui demandait M. Leffler et a jugé que la procédure
était close. Le raisonnement était le suivant : « 1) Il ressort des
éléments fournis que la signification ou la notification de la citation
adressée à Berlin Chemie ont eu lieu conformément à la loi allemande, Berlin
Chemie ayant toutefois refusé de recevoir les actes au motif que ceux-ci
n’étaient pas rédigés en allemand. 2) La citation présentée en Allemagne n’a
pas été traduite dans la langue officielle de l’Etat requis ou dans une langue
comprise du destinataire. Il n’est dès lors pas satisfait à l’exigence énoncée
à l’article 8 du règlement CE sur les notifications. En conséquence, il
convient de rejeter la demande de décision par défaut. »
Leffler
a formé un pourvoi en cassation contre l’arrêt du 18 décembre 2001. Il a
soutenu que le Gerechtshof avais commis une erreur de droit au deuxième point
des motifs de son arrêt. Selon l ui,
le Gerechtshof aurait dû accorder le défaut ; à titre subsidiaire, il a
estimé que la cour aurait dû fixer une nouvelle date d’audience et ordonner que
Berlin Chemie soit citée à comparaître ce jour-là, moyennant rectification des
éventuelles erreurs de l’exploit antérieur.
Le
Hoge Raad der Nederlanden a constaté que l’article 8 du règlement ne prévoit
pas les conséquences d’un refus de recevoir une notification. Il en conclut que
deux interprétations sont concevables, la première étant que l’irrégularité de
la signification pourrait être redressée et la deuxième étant que la
signification irrégulière serait réputée non accomplie.
Par arrêt du 17
octobre 2003, parvenu au greffe de la Cour le 20 octobre 2003, a, dès lors
décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles
suivantes :
1)
Convient-il d’interpréter l’article 8, paragraphe 1, du
règlement en ce sens que, en cas de refus, par le destinataire, de recevoir
l’acte au motif du non-respect de la règle imposée par cette disposition en
matière de langue, l’expéditeur a la possibilité de rectifier ce
manquement ?
2)
En cas de réponse négative à la première question, le
refus de recevoir l’acte a-t-il pour conséquence, en droit, de priver la
notification de tout effet ?
3)
En cas de réponse affirmative à la première
question :
a)
Dans quel délai et de quelle manière la traduction
doit-elle être portée à la connaissance du destinataire ? Les exigences
énoncées par le règlement quant à la notification et à la signification d’actes
valent-elles aussi pour l’envoi de la traduction ou son mode d’envoi est-il
libre ?
b)
Le droit procédural national s’applique-t-il à la
possibilité de rectifier le manquement ?
La
Cour, « à la suite d’un raisonnement fortement marqué de téléologie »[3], a dit
que « lorsque le destinataire d’un acte a refusé celui-ci au motif que cet
acte n’est pas rédigé dans une langue officielle de l’Etat membre requis ou
dans une langue de l’Etat membre d’origine que ce destinataire comprend,
l’expéditeur a la possibilité d’y remédier en envoyant la traduction
demandée ».
La
scène à la jurisprudence de la Cour européenne de Justice a ouvert avec une grande
première, c’est dit, et avec raison. L’interprétation de l’article 8(1) du
règlement, « la disposition centrale au compromis entre les intérêts du
requérant et des intérêts du destinataire dans le mine de signification »
prend place centrale[4].
Les
commentaires de cet arrêt mettent en relève le fait que, pour la première fois
le juge communautaire s’exprime très clairement sur l’espace judiciaire
européen en matière civile et commerciale. Il diminue le rôle du droit des
Etats membres, en ce qui concerne la coopération judiciaire dans les matières
civiles ayant une incidence transfrontalière, et consacre le principe de
l’interprétation autonome des mesures respectives. Il dit expressément que le
rapport de la convention qui avait précédé le règlement, ne saurait être
invoqué « à l’encontre d’une interprétation autonome du règlement ».
La même chose vaut pour les travaux préparatoires aussi.
Si
le refus du destinataire d’accepter l’acte à signifier ne pourrait jamais être
remédié, les droits du requérant seraient tellement nuits qu’il n’oserait
jamais signifier un acte qui ne serait pas traduit. Comme ça, l’utilité du
règlement, et en particulier les dispositions sur la traduction d’actes,
lesquelles contribuent au but d’assurer que les actes sont transmis rapidement,
seraient minées[5].
La
Cour « ordonne » ainsi la « communautarisation » des
méthodes d’interprétation des instruments de droit international privé par le
juge national, en mettant aussi l’accent sur le fait que « lorsque le
règlement ne prévoit pas les conséquences de certains faits, il appartient au
juge national d’appliquer, en principe, son droit national tout en veillant à
assurer la pleine efficacité du droit communautaire, ce qui peut le conduire à
écarter, si besoin est, une règle nationale y faisant obstacle ou à interpréter
une règle nationale qui a été élaborée en ayant uniquement en vue une situation
purement interne afin de l’appliquer à la situation transfrontalière en
cause ».
C’est
justement signalé qu’on ne pourrait pas laisser au droit national décider si le
principe de remédier la manque de traduction, est accepté. Une telle attitude
serait obstacle à l’application uniforme du règlement. Le Traité d’Amsterdam a
souligné l’importance de l’uniformité à l’application des textes
communautaires. En plus, le fait que pour les significations ou notifications
on ait choisi un règlement au lieu d’une directive, comme instrument approprié,
parle aussi pour l’uniformité d’application.
La
Cour, en examinant la possibilité de remédier la manque de traduction, ne se réfère pas au droit national. Le fait
que le règlement n’a pas de règle express sur ce point là, n’est pas considéré
comme donnant la possibilité de développer un argument a contrario. Un
tel argument paraissait acceptable à plusieurs commentateurs dans le passé,
quant à l’application de la Convention de La Haye[6].
Cette
attitude de la Cour, c’est-à-dire le fait qu’elle n’utilise aucun argument tiré
des règles nationales sur la possibilité de remédier la manque de traduction,
est vivement critiquée par certains commentateurs. A leur avis, l’Avocat Général
devrait avoir fait une étude comparative des droits nationaux des Etats membres
sur ce point – là, puisque, comme c’est signalé, l’interprétation autonome
fortifie bien sûr l’uniformité, mais elle ne devrait pas exclure des approches
comparatives[7].
La
Cour distingue clairement entre les conventions préexistentes et les règlements
qui les ont remplacées. Plusieurs règlements sont les héritiers des Conventions
faites dans la décennie de 1990’. Toutes ces Conventions étaient accompagnées
de rapports explicatifs rédigés par des juristes ayant eu un rôle principal à
la rédaction des Conventions respectives. Il y avaient beaucoup moins de
travaux préparatoires officiels, comme documents aidant à l’application de ces
textes, alors ces rapports explicatifs constituent de sources valables
d’interprétation.
Il
paraît, pourtant, que les règlements adoptés n’étaient pas toujours identiques
aux Conventions qui les avaient précédés. Ceci est encore plus vrai au cas où
un règlement « suive » une Convention qui n’était jamais entrée en
vigueur.
Comparé
aux autres règlements héritiers de Conventions, le règlement 1348/2000 a
intégré les plus importants changements de la Convention qui l’avait précédé.
Il paraît que cette Convention avait subi de critiques très sévères. Le
règlement a adopté un modèle de signification ou notification qui est bien
différent du modèle prévu par la Convention, laquelle avait « copié »
la Convention de La Haye. Vu ça, c’est naturel que le rapport explicatif de la
Convention soit beaucoup moins utile pour l’interprétation du règlement que les
rapports explicatifs des autres Conventions sont pour les règlements qui les
ont suivies et qui ne diffèrent pas tellement en ce qui concerne le contenu des
textes.
Un
grand juriste allemand, commentant l’arrêt et ses conséquences, résume ainsi
les problèmes de la signification ou notification internationale et les
résultats de l’arrêt pour l’espace européen :
Le
sens de la signification ou de la notification est la connaissance par le
destinataire, du contenu de l’acte signifié ou notifié, pour que son droit de
défense soit garanti. Cela requiert qu’il puisse comprendre l’acte sans avoir à
demander de conseil ou à deviner ce contenu. Pour cette raison, la
signification ou la notification formelle doit être accompagnée par une
traduction, qui proportionnera au destinataire la connaissance nécessaire du
contenu de l’acte. Par conséquent, les tribunaux ne peuvent pas accepter de
traductions insuffisantes qui pourraient nuire le destinataire.
De
l’autre côté, le destinataire peut renoncer à la protection l ui offerte par la signification ou la
notification formelle, et l’accepter sans traduction, soit parce qu’il comprend
la langue de l’acte signifié ou notifié, soit parce qu’il veut lui-même
s’occuper de la traduction. C’est ce que le règlement ordonne, partant de
l’idéal de l’espace judiciaire européen unitaire. Pourtant, on commente, par
permettant ça, on jette l’enfant aussi avec l’eau de la baignoire. Parce que le droit de refuser de recevoir
l’acte se fait dépendre des connaissances de langues du destinataire. Le
renoncement à la traduction est tolérable seulement si le destinataire le
décide, en accord avec l’article 8 paragraphe 1b, c’est-à-dire, si l’acte est
établi dans une langue de l’Etat membre d’origine comprise du destinataire. Ce
serait pratiquement impossible qu’un tribunal décide sur les connaissances de
langues d’un destinataire ; ce retarderait le litige et apporterait un
élément d’insécurité dans le droit des significations et des notifications.
C’est
possible de remédier à l’absence de traduction ou à la mauvaise traduction.
Toutefois, la rétroactivité paraît problématique. Comme c’est signalé, dans
l’espace judiciaire européen, après l’arrêt Leffler nous devons vivre
avec de moments de remède des significations ou des notifications, différents. Luxemburg
locuta, causa finita! On ne pourrait pas, quand même, accepter ça en dehors du
champ d’application du règlement, puisque la règle est que le remède de
traduction vaut dès le moment de la signification ou de la notification de la
traduction[8].
Différemment
de ce qu’il vaut selon l a Convention
de La Haye (article 5 paragraphe 3), dans le cadre du règlement, la traduction
de l’acte à signifier ou à notifier n’est pas un présupposé de validité per se.
Comme c’est déclaré par l’avocat général Stix-Hackl dans ses conclusions
pour l’affaire Leffler, joindre la traduction de l’acte selon l e règlement n’est pas un présupposé d’une
signification ou d’une notification valide, mais ça offre simplement au
destinataire, en vertu de l’article 8 du règlement, un droit de refus de
réception de l’acte[9].
De
toute façon, de l’arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes dans
l’affaire Leffler, sur la répétition de la signification ou de la notification,
en joignant la traduction de l’acte, ne découle aucune règle de remède dans le
cadre du règlement, puisque l’arrêt se limite aux conséquences de l’exercice du
droit de refus de réception de l’acte à cause de la langue utilisée[10].
D’ailleurs, on commente, l’affaire ne concernait pas une faute de signification
ou de notification au sens étroit, c’est pourquoi l’objet de l’arrêt n’était
pas non plus un remède éventuel au sens étroit[11]. Selon
cette opinion, l’article 8 du règlement et, avec ça, la jurisprudence de la
Cour de justice des Communautés européennes ne s’appliquent pas au cas où des
Etats membres - comme c’est le cas de l’Allemagne et de l’Autriche – requièrent
une traduction de l’acte à signifier ou à notifier par la poste, sans aucune
exception.
On base cette
opinion à l’article 14 paragraphe 2 du règlement, qui dit que « Tout Etat
membre peut préciser, conformément à l’article 23, paragraphe 1, sous quelles
conditions il acceptera la signification ou la notification des actes
judiciaires par la poste ». Selon cette opinion, une telle précision de la
part d’un Etat membre, conformément à l’article 14 paragraphe 2 du règlement,
par laquelle précision l a traduction
de l’acte judiciaire signifié ou notifié par la poste est absolument
nécessaire, se prévaut, comme lex specialis.
D’autres
juristes, commentant le règlement et la jurisprudence de la Cour de justice des
Communautés européennes ainsi que des tribunaux nationaux devant lesquels se
présentent affaires dans lesquelles se posent questions sur les dispositions du
règlement, croient que la susmentionnée opinion n’est pas correcte. A leur
avis, la déclaration de l’Autriche que, la signification ou la notification par
la poste dans le pays, d’un acte judiciaire établi dans la langue de l’Etat d’origine,
sans que cet acte soit accompagné par une traduction, sera considérée comme non
faite, n’est pas en accord avec l’arrêt Leffler[12].
Affaire C-473/04, Plumex / Young Sports NV
Plumex,
société de droit portugais ayant son siège social au Portugal, s’est vu
signifier à son adresse au Portugal un jugement
d’une juridiction de première instance belge, rendu dans une affaire
opposant cette société à Young Sports NV. Cette signification a été effectuée à
la fois par l’entremise de l’entité d’origine et de l’entité requise
ainsi que par la poste. Le 17 décembre 2001, Plumex a interjeté appel de ce
jugement devant la cour d’appel belge (Hof van beroep). Ce dernier a
rejeté cet appel pour tardiveté estimant que le délai d’appel prévu à l’article
1051 du code judiciaire belge avait expiré le 11 décembre 2001, car le délai
aurait commencé à courir le jour de la première signification valablement
effectuée, en l ’occurrence celle par
la poste.
Plumex
a formé un pourvoi contre la décision de rejet devant le Hof van Cassatie,
faisant valoir que le règlement devait être interprété en ce sens que la
signification par l’entremise de l’entité d’origine et de l’entité requise
constituait le mode principal de signification prévalant sur celle par la
poste. Ainsi, le délai d’appel devrait être calculé à partir de la date de
cette signification principale, laquelle était intervenue postérieurement à la
signification par la poste, puisque cette dernière n’aurait qu’un caractère
secondaire.
Le
Hof van Cassatie a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour de
justice des Communautés européennes les questions préjudicielles
suivantes :
« 1) La signification visée aux
articles 4 à 11 inclus est-elle le moyen principal de signification et la
signification faite directement par la poste, visée à l’article 14, un moyen
subsidiaire de signification étant entendu que le premier moyen prime le
deuxième moyen l orsque les deux sont
accomplis selon l es dispositions
légales ?
2) En cas de cumul de significations, faites, d’une part, conformément
aux articles 4 à 11 inclus et, d’autre part, directement par la poste
conformément à l’article 14, le délai d’appel prend-il cours envers le
destinataire de la signification à la date de la signification faite
conformément aux articles 4 à 11 inclus et non pas à la date de la
signification faite conformément à l’article 14 ? ».
Suivant
l’opinion l argement majoritaire, la
Cour a répondu qu’il n’existe aucun rapport hiérarchique entre les deux modes
de signification (point 20) et que, par conséquent, « il est possible de
signifier un acte judiciaire par l’un ou l’autre de ces deux moyens ou de
manière cumulative ».
C’était
aussi l’opinion de tous les gouvernements qui sont intervenus, de la
Commission, ainsi que de l’avocat général Tizziano. Le dernier, dans ses
conclusions, a mis l’accent sur le fait que le règlement ne contient aucune
disposition qui fixe un ordre de priorité entre les divers moyens de
signification prévus et que, d’autre part, cette conclusion serait conforme à
la finalité du règlement 1348, qui entend « améliorer et ….. accélérer
« la transmission entre les Etats membres des actes judiciaires et
extrajudiciaires en matière civile ou commerciale aus fins de signification ou
de notification ».
Sur
la seconde question, il y avait d’opinions différentes, quant à
l’interprétation du « silence » du règlement sur ce point. La
Commission et le gouvernement autrichien déduisaient de ce silence que la
réponse devrait être recherchée, non dans le règlement mais dans les différents
ordres juridiques nationaux. Par conséquent, en cas de cumul, pour déterminer
quelle est la signification qui fait courir un délai de procédure déterminé (en l ’espèce le délai d’appel), il faudrait se référer
aux indications résultant à cet égard du droit national concrètement applicable
(point 30 des conclusions).
Au
contraire, l’avocat général, de même que les gouvernements finlandais, suédois
et du Royaume-Uni, pensaient qu’une interprétation « communautaire »
serait préférable, tenant compte des finalités explicites du règlement.
Ainsi,
la Cour, adoptant cette dernière position, a dit que le règlement doit
être interprété en ce sens que, en cas de cumul du moyen de transmission et de
signification prévu à ses articles 4 à 11 et celui prévu à son article 14, il
convient, pour déterminer à l’égard du destinataire le point de départ d’un
délai de procédure lié à l’accomplissement d’une signification, de se référer à
la date de la première signification valablement effectuée.
C’est
bien intéressant la question qu’on pose quant à l’expression « date de la
signification par la poste » : Est-ce qu ‘elle signifie la
date de l’expédition de la lettre ou celle de sa réception par le
destinataire ? La question ne présentait dans cette affaire aucun intérêt
pour l’interprétation du Règlement communautaire, vue que la date d’expédition
de la lettre recommandée et celle de la réception par son destinataire étaient
l’une et l’autre antérieures à celle de la signification par l’entremise des
entités. Mais, on observe, ça reste un problème important. Par exemple, en
droit belge, un acte transmis par la voie postale est réputé notifié au jour de
son expédition à la poste (article 40 code judiciaire). A cause des critiques suscitées, on a octroyé
récemment un délai supplémentaire de 3 jours pour tenir compte forfaitairement
des délais de transmission (article 53 bis code judiciaire)[13].
D’après
une opinion, « quoi qu’en dise la motivation de l’arrêt commenté du 9
février 2006, la solution européenne ne tient pas le destinataire de l’acte à
l’abri de tout risque ».
Conclusions
Dans
le passé, la protection du demandeur contre une signification trop compliquée à
l’étranger était au centre des règles de procédure internationales. L’évolution
de ce genre de règles a montré qu’il convient de prendre en compte les intérêts
légitimes de toutes les parties, tout en veillant au bon déroulement de la
procédure. C’est ce que les considérants du règlement aussi montrent. Comme
c’est très bien décrit par les conclusions de l’avocat général Stix-Hackl
(28 juin 2005), « la transmission et la signification d’actes judiciaires
ou extrajudiciaires dans le circuit intracommunautaire conformément à la
procédure prévue aux articles 4 et suivants du règlement soulèvent des
questions pratiques non seulement en raison de la coopération nécessaire entre
les autorités de différents Etats membres mais aussi à l’endroit des barrières
linguistiques à franchir. De plus, un certain nombre de questions juridiques
peuvent surgir notamment, voire principalement, en raison de l’absence
d’harmonisation des règles de procédure ».
Néanmoins,
le dernier n’est pas facile à être réalisé – et, selon une opinion assez
répandue dans le monde des juristes, pas toujours opportun.
[2] A. Stadler,
Ordnungsgemäße im Wege der remise au parquet und Heilung von Zustellungsfehlern
nach der Europäischen Zustellungsordnung, IPRax 2006, 116, 122.
[6] R. Stürner,
Förmlichkeit und Billigkeit bei der Klagzustellung im Europäischen
Zivilprozess, Juristen Zeitung 1992, 325, 331, Brand/Reichelm,
Fehlerhafte Auslandszustellung, IPRax 2001, 175, 176.
[8] R.A. Schütze,
Übersetzungen im europäischen und internationalen Zivilprozessrecht – Probleöe
der Zustellungm RIW 2006, 352, 355-356.
[9] J. Kondring,
Voraussetzungen, Wirkung, Wirksamkeit und Rechtswirkung der Zustellung: Eine
scheinbar babzlonische Begriffsverwirrung um das auf die internationale
Zustellung anwendbare Recht. Zugleich ein Beitrag zur entgegenstehenden
Rechtshängigkeit, IPRax 2007, 138, 141-142.
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